Nadia Barrientos - Paris Sortilèges

La Descente de la Courtille

Sur les traces fantasques de Milord L’Arsouille et des fantômes du carnaval de Belleville.

Convivialités et délinquances : guinguettes, ivresses, Apaches.

Point d’orgue du célèbre Carnaval de Paris au point du jour succédant à Mardi-Gras, chaque année, la “Descente de la Courtille” à Belleville exauçait jusqu’à la moitié du XIXème s. le paroxysme de la fête populaire: ivresses et chahuts, chansons et insurrections scandaient la descente de la festive rue de Belleville-alors en dehors de Paris- vers la porte qui ouvrait sur la capitale. Cétait alors le déversement au coeur de Paris (l’actuelle place de la République) d’une foule ivre et bigarrée, aux allures rutilantes et bricolées qui refluait depuis les faubourgs, creuset populaire pétri de cabarets et de guinguettes.

Tradition populaire à laquelle se mêlaient volontiers bourgeois en quête de l’exotisme d’une “tournée des Grands Ducs”, cette descente tapageuse de l’artère descendant vers la ville connut son apogée vers 1830 et à l’escorte de figures fantasques désomais rentrées dans la légende: l’extravagant Milord l’Arsouille prêchant la folie par l’exemple du haut de chars aux fantaisies inégalées, ou encore Ramponneau, le patron jovial du fameux cabaret du Tambour Royal où toutes les soifs trouvaient leur compte.

 

Descendre la rue de Belleville aujourd’hui c’est bien sûr remonter le temps d’une marginalité de la fête où joyeux gaillards, ouvriers et joyeux frondeurs tenaient encore tête, et en costume de fête, à l’espace urbain dans un esprit d’indépendance qui court toujours sur les hauteurs de Belleville,

C’est aussi invoquer les fantômes des innombrables guinguettes, café-concerts, cabarets, théâtres et attractions qui ourlaient son parcours et dont les façades se souviennent,

C’est enfin ressusciter le patrimoine vivant des rixes et des chansons, des esclandres et des ivresses d’une société de la frontière: frontière géographique avec la ville, frontière sociale que vient creuser la Révolution industrielle, frontière culturelle enfin d’une tradition immatérielle que la grande Histoire ne retient pas.

Suivons le La des réjouissances et réveillons les soifs d’un “Allons enfants de la Courtille, Le jour de boire est arrivé!” tel que la “Marseillaise de la Courtille” le chuchote encore à qui sait tendre l’oreille et …approcher la gorge.

Nadia Barrientos - Paris Sortilèges
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